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À Hollywood, les acteurs rejoignent les scénaristes dans la grève, une première depuis 1960

La production de séries et de films à Hollywood va être complètement gelée : après les scénaristes, à l’arrêt depuis plus de deux mois, les acteurs américains ont eux aussi décidé de se mettre en grève, jeudi 13 juillet, pour ce qui devrait constituer la pire paralysie du secteur en plus de 60 ans.

« Le conseil national du SAG-AFTRA a voté à l’unanimité un ordre de grève contre les studios et les diffuseurs », a annoncé Duncan Crabtree-Ireland, le directeur exécutif national de ce syndicat qui représente 160 000 acteurs et autres professionnels du petit et du grand écrans.

La grève va débuter jeudi soir à minuit, heure de Los Angeles, soit vendredi à 7 h GMT. Les acteurs vont ainsi rejoindre sur les piquets de grève les scénaristes, qui ont cessé le travail depuis début mai. Un double mouvement social jamais vu depuis 1960 à Hollywood.

Les deux corps de métier réclament une revalorisation de leur rémunération, en berne à l’ère du streaming. Ils souhaitent également obtenir des garanties concernant l’usage de l’intelligence artificielle (IA), pour empêcher cette dernière de générer des scripts ou de cloner leurs voix et image.

L’entrée en grève des acteurs va porter un sacré coup à l’industrie. L’Alliance des producteurs de cinéma et de télévision (AMPTP), qui représentait les studios et plateformes de streaming dans les négociations, s’est dite « très déçue » de leur échec. Le patron de Disney, Bob Iger, a même fustigé des exigences « irréalistes » sur la chaîne CNBC.

Depuis mai, les seules productions qui ont décidé de tourner le font sur la base de scripts déjà terminés au printemps, sans pouvoir les modifier. C’est notamment le cas du préquel du « Seigneur des anneaux » financé par Amazon, la série « Les Anneaux de pouvoir ». Mais, sans comédiens, les tournages ne seraient tout simplement plus possibles. Seuls quelques talk-shows et émissions de télé-réalité pourraient se poursuivre.

Une dernière grève des acteurs qui remonte à 1980

Les acteurs ont aussi le pouvoir de gripper sérieusement la promotion des blockbusters de cet été, comme le très attendu « Oppenheimer », de Christopher Nolan. Lors de la première du film à Londres jeudi, l’actrice Emily Blunt a expliqué à la presse que le casting quittera « ensemble » le tapis rouge en signe « d’unité », si la grève est formellement approuvée.

« Nous devrons le faire. Nous verrons ce qui se passera », a-t-elle déclaré, en réaffirmant son espoir d’un « accord équitable » avec studios et plateformes. La première américaine du film, prévue lundi à New York, risque d’être réduite au minimum.

L’absence de comédiens sur les tapis rouges laisserait un grand vide en Californie. Comic-Con, la grand-messe des geeks et amateurs de bande dessinée américains, devrait ainsi se dérouler sans vedettes à partir du 20 juillet à San Diego.

Avant la grève, Disney a expliqué que le lancement de son nouveau film, « Le Manoir hanté », serait réduit à un « événement privé » pour les fans lors du week-end en cas de mouvement social.

Même la cérémonie des Emmy Awards, équivalent des Oscars pour la télévision, prévue le 18 septembre, est menacée. La production envisage déjà de reporter l’événement en novembre, voire en 2024, selon la presse américaine.

Car nul ne sait combien de temps le mouvement pourrait durer. Les acteurs n’ont pas fait grève depuis 1980. La dernière grève des scénaristes, qui remonte à 2007-2008, avait duré 100 jours et coûté deux milliards de dollars au secteur.

L’enjeu des rémunérations « résiduelles »

Une double grève confirmerait la crise existentielle qui frappe actuellement Hollywood. Fin juin, des centaines d’acteurs célèbres, parmi lesquels Meryl Streep, Jennifer Lawrence et Ben Stiller, ont signé une lettre estimant que leur industrie était à un « point d’inflexion sans précédent ».

Depuis une dizaine d’années, l’avènement du streaming a bouleversé les rémunérations « résiduelles » des acteurs et scénaristes, découlant de chaque rediffusion d’un film ou d’une série.

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Intéressants avec la télévision car calculés en fonction du tarif des publicités, ces émoluments sont bien moindres avec les plateformes de streaming, qui ne communiquent pas leurs chiffres d’audience et paient un forfait, indépendamment du succès.

Sans ces revenus essentiels pour absorber les périodes d’inactivité entre deux productions, les nombreux travailleurs qui n’ont pas le statut d’acteur ou auteur star dénoncent une précarisation de leur métier.

Le développement rapide de l’IA, qui menace de les remplacer, ne fait qu’ajouter de l’huile sur le feu. Disney y a par exemple eu recours pour produire le générique de sa nouvelle série Marvel lancée en juin, « Secret Invasion ».

À New York, jeudi, plusieurs acteurs étaient déjà sur les piquets de grève. « C’est douloureux et c’est nécessaire », a expliqué à l’AFP Jennifer Van Dyck, une actrice syndiquée. « Quand le patron de Disney gagne 45 millions de dollars par an et que nous demandons juste un salaire décent, je pense que ce sont eux qu’on peut accuser d’être déraisonnables. »

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